La grossesse et l’accouchement sont de véritables épreuves physiques et psychologiques chez une femme. Outre la transformation physique apparente, la femme subit plusieurs transformations psychiques qui ont parfois une incidence non négligeable sur la vie de couple. Les transformations psychiques chez la femme enceinte peuvent être le résultat d’une appréhension de la grossesse et d’angoisses liées à l’accouchement. Ces transformations psychiques peuvent perdurer et devenir pathologiques. On parle dans ce cas de troubles psychiatriques de la grossesse et du post-partum. Voici ce qu’il faut savoir pour mieux prendre en charge ces évènements.
De la transformation physique découle la transformation psychique
La période de la grossesse peut poser un réel questionnement existentiel chez de la femme, les bouleversements concernant à la fois son être, ses désirs et son identité. Les premières manifestations de ces transformations psychiques se perçoivent sous forme de nausées, de fatigue et de migraine et peuvent s’accompagner de diverses formes de malaises corporelles.
À côté de l’angoisse vient le sentiment le plus partagé durant une grossesse : lapeur. Il peut s’agir de la peur de l’accouchement, ou d’une fausse couche voire la peur de la mort en couche.
La période des réactions paradoxales
La grossesse est en quelque sorte une forme d’« effraction ». Il s’agit de l’introduction d’un corps étranger dans le corps de la femme. Ce qui produit des réactions plus ou moins inattendues par moments. Parmi ces sentiments, la toute-puissance, le déni, la sensation d’un corps habité ou encore la sensation d’avoir un corps menacé sont possibles. La femme accueille la grossesse soit comme un accomplissement, soit comme une altération de son corps. Le plus souvent, ces réactions se traduisent en un conflit psychique et une certaine résistance par rapport à tout ce qui se passe.
Le brouillage de l’image de soi
Durant la grossesse, notamment la première période, le brouillage de l’image de soi est le sentiment le plus courant. Dès les premières semaines de la gestation, le corps de la femme prend la valeur d’un corps de mère. Lors de la première échographie notamment, la future mère femme peut être partagée entre des sentiments d'étrangeté, de confusion ou de non-reconnaissance de soi. Et cela corrèle avec une forme de prise de contact avec le foetus. Cette expérience confusionnelle primaire est aussi difficile à expliquer pour la femme que pour son entourage. Elle a juste besoin de soutien et d’assistance.
Quelles sont les troubles psychiques sur le plan clinique ?
Les troubles psychiques notamment au début de la grossesse se manifestent de plusieurs manières.
Manifestations psychologiques mineures
Ce sont des réactions mineures, et le plus souvent transitoires : irritabilité, inquiétudes, labilité émotionnelle, troubles du sommeil, envies diverses, grignotages, etc. Sur le plan schématique, une réaction comme l’anxiété prévaut durant le premier trimestre de la grossesse. Cependant, ces manifestations peuvent se révéler plus durables et durer jusqu’au 6e ou 7e mois de grossesse.
Manifestations psychosomatiques
Les manifestations psychosomatiques se déclinent sous forme de vomissements et concernent plus de 50% des femmes enceintes. Ces vomissements sont banaux et disparaissent avec le temps. Cependant, ils peuvent persister chez 2 à 10% des femmes jusqu’au 3e mois. En fin de compte, les manifestations psychosomatiques peuvent s’avérer graves chez 2 à 4 femmes sur 1000, nécessitant une hospitalisation.
Troubles névrotiques
Ce sont des manifestations dont l’intensité varie sensiblement d’une femme à une autre. Cependant, elles sont généralement importantes et peuvent même s’avérer handicapantes durant une bonne partie de la grossesse. Parmi ces troubles, nous avons les crises d’angoisse, des obsessions ou des phobies. Ce sont des troubles qui découlent de la sensation de ne pas pouvoir accoucher normalement ou encore de ne pas pouvoir satisfaire aux besoins de l’enfant.
Épisodes dépressifs
Ils surviennent souvent durant les premiers mois de la grossesse et sont passagers. Ils se manifestent par des crises de larmes, de l’asthénie, un sentiment d’impuissance, mais aussi de remise en question par rapport à son rôle de future mère. À noter toutefois que les manifestations de mélancolie surviennent durant la dernière phase de la grossesse.
Quels sont les facteurs clés dans le déclenchement des troubles psychiques ?
Plusieurs facteurs entrent en compte dans le déclenchement des troubles psychiques. Parmi ceux-ci, nous avons :
Une vulnérabilité psychique antérieure
Ceci est une donnée non négligeable qui a pourtant une réelle incidence sur l’état psychique de la femme durant la grossesse. Parmi ces vulnérabilités, nous avons les personnalités immatures, la psychose chronique schizophrénique, la maladie maniaco-dépressive ou encore la névrose grave.
Les facteurs liés au stress
Ce sont à la fois les facteurs biologiques, notamment avec l’ampleur des bouleversements endocriniens qui peuvent être des sources de éthologiques des pathologies puerpérales. Il y’a aussi les facteurs obstétricaux et gynécologiques, notamment l’interruption médicale de grossesse, la crainte pour la santé de l’enfant, ou l’hémorragie douloureuse, accouchement prématuré, etc.
Les facteurs psychosociaux
Il s’agit souvent de l’histoire personnelle de la mère qui peut largement influencer sur la grossesse. Ces facteurs peuvent aussi être socio-économiques, circonstanciels ou environnementaux. En effet, l’absence de référent et de support social favorise souvent une désorganisation pathologique (une mère vivant seule, tensions conjugales, conditions sociales peu favorables, perte d’un parent proche, etc.).
Les facteurs culturels
Les facteurs culturels sont enfin évoqués comme étant inhérents à certains troubles psychiques chez la femme enceinte. En effet, certains travaux réalisés sur les femmes issues de l’immigration démontrent qu’elles ont souvent du mal à s’adapter à leur nouvelle vie. Pour le personnel de santé, il est important de prendre en compte aussi bien la langue que les représentations culturelles dans la prise en charge de femmes enceintes et issues de l’immigration.
À noter que ces facteurs influents aussi bien dans les troubles psychiques durant la grossesse qu’après l’accouchement. On les appelle dans ce cas les troubles psychiques post-partum et nécessite une prise en charge appropriée. Mais avant d’en arriver à ce stade, l’entourage comme le personnel médical, doivent faire preuve d’une réelle capacité d’écoute pour les femmes présentant ces symptômes.